Les premiers ministres réclament une augmentation des dépenses de défense
HALIFAX — Les premiers ministres provinciaux et territoriaux appellent Ottawa à augmenter rapidement ses dépenses de défense afin de protéger les relations commerciales du pays avec les États-Unis avant les prochaines élections.
Lors de la conférence de presse de clôture du Conseil de la fédération à Halifax, plusieurs premiers ministres ont souligné l’importance de l’engagement du Canada au sein de l’OTAN à consacrer au moins 2 % de son PIB à la défense.
«Il est vraiment important que nous respections ces obligations sur la scène mondiale», a plaidé mercredi le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, Tim Houston.
«Pour le Canada et ses relations avec les États-Unis, nous sommes des partenaires commerciaux importants, nous voulons qu’ils nous respectent pleinement, sous tous les aspects, y compris notre capacité à honorer nos obligations», a-t-il ajouté.
La semaine dernière, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé qu’il prévoyait atteindre l’objectif de dépenses de défense de l’OTAN en 2032 — un calendrier récemment annoncé après des jours de pression de la part d’autres pays.
Le chef conservateur Pierre Poilievre a rétorqué qu’il ne s’engagerait pas à atteindre l’objectif de dépenses de l’alliance parce qu’il ne faisait pas de promesses qu’il ne saurait tenir.
Enjeu économique
Mercredi, le premier ministre du Manitoba, Wab Kinew, a appelé Ottawa à atteindre l’objectif avant 2032 pour protéger la souveraineté dans l’Arctique et les relations du pays avec les États-Unis.
M. Kinew a rappelé que de nombreux emplois au Manitoba sont liés au commerce avec les États-Unis et qu’il est essentiel d’être un bon partenaire de l’OTAN pour que les relations entre les deux pays «s’épanouissent».
«C’est un investissement dans notre armée et notre défense, mais c’est aussi un investissement économique», a-t-il réitéré lors de la conférence de presse de clôture de mercredi.
«Et si nous ne faisons pas cet investissement, la prochaine administration américaine causera probablement… une certaine consternation en ce qui concerne la relation extrêmement importante avec le commerce américain pour créer des emplois et des opportunités économiques partout au Canada», a-t-il prévenu.
Le premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, a indiqué qu’en raison des plans actuels de financement militaire du Canada, il existe un sentiment «d’anxiété» quant à une éventuelle administration de Donald Trump.
«Avoir une relation étroite avec les États-Unis est vraiment important. Et je pense que le message d’une éventuelle nouvelle administration républicaine est sans ambiguïté quant à ses attentes à l’égard du Canada en termes d’investissements dans la défense», a avancé M. Eby, mercredi.
«Nous encourageons donc vraiment le gouvernement fédéral à se préparer à cela, à se préparer à une nouvelle administration républicaine, afin que nous retirions cela de la table comme l’un des domaines de litige possibles.»
Défense des ressources
Le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Andrew Furey, a également affirmé mercredi qu’Ottawa devrait s’efforcer d’atteindre l’objectif de l’OTAN avant 2032. Il a exhorté le gouvernement fédéral à commencer par investir de l’argent dans la 5e Escadre Goose Bay, la base militaire existante dans l’extrême nord de la province.
M. Furey a poursuivi en disant qu’une autre priorité importante en matière de défense devrait être la protection de la morue de la région — une industrie régionale importante qui était soumise à un moratoire fédéral depuis plus de 30 ans.
Le premier ministre a rapporté que la province célébrait le retour de cette précieuse pêcherie, mais qu’en levant le moratoire, le gouvernement fédéral avait «invité les chalutiers russes à quitter nos côtes».
«Il s’agit d’une ressource qui a été restaurée en bonne santé par les habitants de Terre-Neuve et du Labrador et elle ne mérite pas d’être capturée par les chalutiers russes», a indiqué M. Furey.
Mardi, les premiers ministres du Yukon, Ranj Pillai, R.J. Simpson des Territoires du Nord-Ouest et P.J. Akeeagok du Nunavut ont tenu une conférence de presse sur la sécurité dans l’Arctique et l’importance d’investir en collaboration dans la construction d’infrastructures pour protéger l’Arctique canadien, ciblé par la Russie et la Chine et convoité pour ses abondantes ressources.
Division des compétences
Tout au long de la conférence de trois jours, les premiers ministres ont réitéré leurs appels au gouvernement fédéral pour qu’il se retire des domaines de compétence provinciale et territoriale et qu’il travaille plus en collaboration pour éviter de doubler les programmes comme les soins dentaires ou les cantines scolaires.
«Ce que nous avons demandé à Ottawa, c’est de s’associer avec nous sur ces sujets et de travailler avec nous, et de ne pas essayer de nous contourner — comme cela peut parfois être le cas, comme nous le voyons dans certains projets de logement qui se produisent actuellement», a plaidé M. Houston, mardi.
Un programme fédéral qui échauffe les provinces est le Fonds d’accélération du logement d’Ottawa, qui distribue de l’argent pour le logement directement aux villes et aux municipalités, en contournant les gouvernements provinciaux.
Dans une lettre adressée mercredi à M. Houston et au premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, M. Trudeau a réitéré que l’intention de son gouvernement était d’utiliser le financement fédéral pour améliorer la vie des Canadiens, «sans empiéter sur les compétences provinciales et territoriales».
Cette lettre arrive après que M. Eby ait comparé, mardi, le fait de travailler avec Ottawa à «se cogner la tête contre un mur».
M. Eby a déclaré aux journalistes que depuis des années, lors de ces réunions de la fédération, lui et ses homologues demandaient une rencontre avec Justin Trudeau.
«Cet appel reste sans réponse et je ne comprends pas pourquoi, car nous avons beaucoup de travail à faire ensemble», a déploré le premier ministre.