Les populations mondiales de poissons menacées, dont celles au Canada atlantique

HALIFAX — Une nouvelle étude prévoit un déclin marqué des populations mondiales de poissons, y compris des espèces du Canada atlantique, d’ici la fin du siècle, si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent à un rythme incontrôlé.

Le rapport publié la semaine dernière par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) prévoit qu’avec une augmentation moyenne de la température comprise entre 3 et 4 °C, la biomasse des poissons diminuerait de plus de 30 % d’ici 2100 dans 48 pays.

La Chine, qui est le plus grand consommateur mondial de produits de la mer, fait partie des pays dont les captures connaîtront la plus forte baisse au monde, avec une perte de 31 %.

En revanche, un scénario à faibles émissions de carbone – ou un réchauffement de 1,5 à 2 °C – prévoit une perte de poisson de moins de 10 % dans le monde.

L’étude mesure la biomasse comme la quantité totale de poissons signalés dans une masse d’eau spécifique, en utilisant une mesure en grammes de carbone par mètre carré d’eau.

Andrea Bryndum-Buchholz, écologiste marine à l’Université Memorial à Saint-Jean, Terre-Neuve-et-Labrador, a été l’une des 41 participantes à cette étude. Elle affirme que les pêcheries canadiennes sont vulnérables à mesure que la température de l’eau augmente dans le nord-ouest de l’Atlantique.

Par ailleurs, le golfe du Saint-Laurent, qui borde le Québec et les quatre provinces de l’Atlantique, est la région au Canada qui se réchauffe le plus rapidement.

«Tous ces modèles s’accordent sur le fait que la biomasse des poissons va diminuer dans certaines zones en raison de l’augmentation de la température de l’eau», a résumé la chercheuse Bryndum-Buchholz dans une entrevue la semaine dernière.

L’étude montre que les trois quarts des zones marines protégées de la côte est – des régions qui assurent la conservation à long terme des espèces marines – se situent dans des points chauds du changement climatique, où les eaux devraient se réchauffer à des rythmes plus élevés.

Mme Bryndum-Buchholz souligne que cela a des implications pour les pêcheurs de la région, qui pourraient être confrontés à des défis importants dans les pires scénarios d’émissions de GES.

«L’industrie de la pêche est extrêmement importante ici. Cela doit être durable», a-t-elle déclaré.

Elle a ajouté que si le changement climatique se poursuit au rythme actuel, il créera des pressions en faveur de fermetures de pêche qui nuiront à un élément clé de l’économie de la région.

«La pêche fait partie intégrante des Maritimes et d’autres régions du monde, c’est pourquoi nous voulons en général réduire les moratoires parce que l’accès (au poisson) est important.»

Mme Bryndum-Buchholz estime que les gouvernements qui gèrent les stocks de poissons pourraient adopter une approche basée sur les risques, adaptée à chaque région, en surveillant attentivement la biomasse, le comportement des animaux et la température de l’eau dans chaque zone.

«Nous ne pouvons pas avoir de solution mondiale (à la sécurité alimentaire) même si nous disposons de ces projections mondiales. Ce n’est pas une approche universelle», a-t-elle déclaré.

Cette approche implique un investissement beaucoup plus élevé et amènerait les gouvernements à ajuster les captures autorisées lorsqu’il y a des premiers signes de déclin, à imposer des restrictions de capture pour empêcher la pêche des poissons d’âge juvénile et à ajuster les zones marines protégées pour répondre plus efficacement aux changements climatiques.

L’augmentation de la température de l’eau peut influencer des facteurs tels que les habitudes de migration et de reproduction, a expliqué la chercheuse terre-neuvienne. La migration du homard est un exemple de changement dans les habitudes migratoires: de plus en plus de homards s’éloignent des eaux du Maine à mesure que les eaux de l’Atlantique se réchauffent.

Les zones du Canada atlantique où l’on s’attend à un réchauffement et à un déclin de la biomasse comprennent le plateau néo-écossais, qui suit la côte sud de la Nouvelle-Écosse, le chenal Laurentien, entre les îles du Cap-Breton et de Terre-Neuve, ainsi que les Grands Bancs, qui suivent le coin sud-est de Terre-Neuve.