Soins à domicile: bien plus que des changements de pansements
SANTÉ – Ses patientes se suivent, mais ne se ressemblent pas. Chaque jour, l’infirmière Lucie Ouellet fait sa tournée auprès d’elles. En la suivant à travers ce reportage, les sceptiques qui croient que son rôle ne consiste qu’à changer des pansements seront confondus.
Lundi après-midi, 13 h 30. Thérèse (nom fictif) accueille son infirmière avec le sourire. «Votre fin de semaine s’est bien passée?», lui demande Mme Ouellet. «Non, répond sa patiente. Ça saignait! Un infirmier est venu m’aider à soigner ma plaie», raconte la retraitée.
Après quelques vérifications, Lucie Ouellet décide de ne pas toucher au pansement tout neuf. Elle reviendra dans deux jours. «Je ne fais pas qu’un traitement. J’enseigne aussi l’autonomie des soins, insiste l’infirmière. Je ne la lâcherai pas tant qu’elle ne fera pas ses soins toute seule.»
C’est tout ce que demande Thérèse qui est en train d’apprendre à se soigner. Malgré sa chirurgie d’urgence subie il y a un mois et sa nouvelle condition de santé, le moral est bon. «Je veux être plus autonome. Je ne traînerai pas une infirmière avec moi tout le temps!», blague-t-elle.
Aînés réfractaires
Il est temps de partir. Lucie Ouellet quitte sa patiente l’esprit tranquille. Ce n’est pas toujours le cas. Certains aînés à qui elle rend visite vivent dans des conditions précaires, mais refusent l’aide supplémentaire, que ce soit pour les tâches domestiques ou les soins d’hygiène.
Tous ses patients reçoivent le jour même une confirmation téléphonique du rendez-vous avec leur infirmière. Il lui est déjà arrivé de se buter contre une porte verrouillée. «Quand il n’y a pas de réponse à domicile, ça ne s’arrête pas là, dit-elle. Surtout quand je sais que la personne ne sort pas! Il m’est déjà arrivé d’appeler la police pour retrouver des gens par terre.»
«Quand il n’y a pas de réponse à domicile, ça ne s’arrête pas là. Surtout quand je sais que la personne ne sort pas! Il m’est déjà arrivé d’appeler la police pour retrouver des gens par terre.»
Lucie Ouellet
Vieille plaie
La deuxième visite de l’après-midi se fait chez une dame âgée. Deux fois par semaine, elle reçoit Lucie Ouellet depuis un an à la maison pour soigner une plaie qui tarde à guérir.
Depuis que sa patiente a perdu son mari, au début de l’automne, l’infirmière a haussé sa vigilance d’un cran auprès d’elle. Avant même de vérifier son pansement, elle regarde si le calendrier quotidien est réglé au bon jour et la bonne date.
En vue d’un scan, la dame prend de nouveaux médicaments à conserver au frais. L’infirmière saisit subtilement l’occasion pour inspecter le contenu du frigo afin de voir si sa patiente s’alimente bien.
«Elle a des petites atteintes cognitives pour lesquelles on l’évalue présentement. Je lui ai suggéré de l’aide pour les soins d’hygiène, mais elle a refusé. Quand une auxiliaire se joint à nous, c’est le regard d’une autre personne qui s’ajoute», précise Mme Ouellet.
Le pilulier est devenu un outil indispensable pour sa patiente. «Il y a eu quelques échappées, mais c’est sous contrôle. Il faut savoir s’organiser, s’allier avec la famille. Quand il y a un problème qu’on n’est pas capable de régler, on appelle le médecin ou le pharmacien», décrit l’infirmière. Heureusement, son neveu qui est présent lors de notre visite l’aide à entretenir la maison et à se présenter à ses rendez-vous.
Acceptation
L’infirmière fulmine quand, dans les manchettes, les soins à domicile sont pointés du doigt après la mort d’une personne âgée seule dans sa maison. «Il faut amener les aînés à accepter de l’aide, mais ce n’est pas toujours facile, affirme-t-elle. J’en ai vu des gens dans la misère! Dans ce temps-là, je les accompagne et je reste alerte, dit-elle. Souvent, je les rattrape quand ils sont hospitalisés.»