Des experts soulignent l’urgence de rassurer le public face au lait contaminé
TORONTO — Des experts en marketing affirment que deux entreprises qui ont récemment dû rappeler du lait à base de plantes contaminé par la Listeria peuvent se remettre de l’éclosion mortelle, mais qu’elles doivent agir rapidement pour regagner la confiance des consommateurs.
Ils soutiennent que Danone et Walmart devraient s’excuser rapidement pour les enjeux liés à leurs produits respectifs Silk et Great Value, et expliquer spécifiquement au public ce qu’elles font pour rectifier la situation.
«Je n’ai pas encore vu d’excuses de la part de Danone, ce qui signifie qu’ils sont déjà en retard du point de vue de la gestion de crise», a écrit David Pullara, professeur de marketing à la Schulich School of Business de l’Université York, dans un courriel.
Jeudi, le ministère de la Santé de l’Ontario a révélé que la province avait enregistré deux décès liés à 18 boissons à base de plantes, dont les laits d’avoine, d’amande et de coco. Quinze portaient le nom Silk et trois portaient la marque Great Value.
Douze personnes, soit dix en Ontario, une au Québec et une en Nouvelle-Écosse, sont tombées malades après avoir bu les produits rappelés pour la première fois le 8 juillet.
La Listeria peut rendre les gens malades jusqu’à deux mois après avoir consommé des produits contaminés, ont souligné des experts en santé publique.
«C’est le cauchemar de toute entreprise. Aucune entreprise ne veut être responsable de la mort de personnes après avoir consommé ses produits, et pourtant, c’est ce qui s’est produit ici, a affirmé M. Pullara. Mais la triste vérité est que les entreprises sont dirigées par des personnes et que celles-ci font des erreurs. Des entreprises ont déjà commis des erreurs tragiques et ont réussi à s’en remettre.»
Walmart n’a pas répondu à une demande de commentaires et la responsable des communications de Danone Canada, Jennifer Vincent, n’a pas répondu aux questions quant à savoir si l’entreprise présenterait des excuses ou quelles mesures elle prendrait pour rectifier la situation.
Elle a dirigé La Presse Canadienne vers une déclaration mercredi du président de Danone Canada, Frédéric Guichard, qui a qualifié la situation de «bouleversante», a présenté ses «plus sincères sympathies» aux personnes touchées par l’éclosion et a déclaré que l’entreprise avait retiré les produits concernés des étagères des magasins.
Vendredi, Mme Vincent a ajouté que la compagnie collaborait avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments pour enquêter sur la situation «en profondeur».
Une page de questions fréquemment posées sur le site web de l’entreprise indique que les produits Silk rappelés ont été fabriqués dans une usine de fabrication tierce, mais Danone n’a pas identifié qui gère le site.
Le modèle de Maple Leaf
Joanne McNeish, professeure agrégée en marketing à la Toronto Metropolitan University, a fait valoir que les entreprises impliquées dans l’épidémie devaient agir rapidement pour contenir le problème.
«Elles doivent arrêter la production, démonter les machines pour les nettoyer en profondeur et nettoyer en profondeur les installations de production, a-t-elle souligné dans un courriel. Ces entreprises testent régulièrement, mais je suggère de tester encore plus souvent.»
Rassurer le public est également essentiel. Cela peut impliquer de parler aux médias et de publier sur les réseaux sociaux les mesures correctives qu’elles prennent.
C’est un modèle sur lequel Les Aliments Maple Leaf s’est appuyé en 2008, lorsque la Listeria a été retracée dans les charcuteries du groupe. Vingt-deux personnes sont mortes et davantage encore ont été infectées.
M. Pullara a rappelé que Michael McCain, alors PDG, avait présenté des excuses sincères, résolu de découvrir ce qui n’allait pas et promis de ne plus laisser cela se reproduire.
«Si Danone veut surmonter cette situation et restaurer la confiance des consommateurs, elle doit s’inspirer du manuel de Michael McCain: nous avons fait une erreur. Nous sommes désolés. Et nous promettons que cela ne se reproduira plus jamais», a déclaré M. Pullara.
Concernant le récent rappel, Maple Leaf a indiqué à La Presse Canadienne une page de sécurité sur son site web décrivant certaines des mesures prises pour éviter une autre tragédie. Parmi ces mesures figurent des vérifications de ses installations de fabrication, qui font l’objet d’examens de manière «agressive», ainsi que des désinfections et des prélèvements réguliers des zones de production et des équipements de fabrication.
L’entreprise a déclaré avoir effectué plus de 478 000 tests en 2023 pour mesurer la qualité et la sécurité des produits, notamment la détection d’allergènes, de micro-organismes et d’agents pathogènes.
Si les marques concernées par le rappel du lait à base de plantes ne font pas ce genre de travail rapidement, Mme McNeish a suggéré que leurs rivaux ne seront pas loin.
«Ils profiteront de cette opportunité pour gagner de la place sur les étagères et promouvoir leurs produits, a-t-elle affirmé. C’est une occasion pour ces marques de gagner des parts de marché en l’absence de Silk en rayon.»
Afin de contrer ces rivaux, il serait très utile de rassurer le public sur la sécurité de leurs produits et peut-être même offrir des coupons de grande valeur pour inciter les consommateurs à essayer à nouveau leurs laits, a indiqué Mme McNeish.
— Avec des informations de Nicole Ireland